samedi, mars 03, 2007

La Vierge Marie dans l'Histoire de France - Chapitre IX

De Saint-Louis à Jeanne d'Arc

Ou des châtiments engendrés par les fautes de Philippe Le Bel et de la protection miraculeuse de Marie en faveur de son royaume de prédilection.

Sur le lit de mort de Saint Louis, emporté par la peste qui ravage l'armée à Tunis, son fils, Philippe III le Hardi a recours à la Vierge et promet d'aller en pèlerinage au Puy s'il retourne en France sain et sauf. Exaucé, le roi accomplit son voeu, et offre à l'insigne basilique une parcelle de la vraie Croix et une partie de l'éponge que les bourreaux du Christ Lui présentèrent imbibée de fiel et de vinaigre (1); il fait de royales libéralités à N.-D. de Pontoise (2), à l'abbaye de N.-D. du Lys, à la Collégiale Royale de N.-D. de Melun et construit N.-D. de Taur à Réalmont. Il meurt en 1285.
Avec son fils, Philippe IV le Bel, monte sur le Trône un Prince dont la piété incontestable et profonde est presque annihilée par un caractère d'une violence rare. Le Roi - à l'aurore de son règne, et comme pour le placer sous la protection de Marie - offre à N.-D. du Puy un magnifique calice d'or (3); en compagnie de ses fils, il vient souvent à N.-D. de Maubuisson et y fait de larges libéralités ainsi qu'à N.-D. de Plaisance près de Montmorillon et à N.-D. du Lys; enfin, près de Bar sur Aube, il fonde le Prieuré de N.-D. du Beauray (4). De son côté, la Reine, Jeanne de Navarre, manifeste sa piété envers Marie dans les constitutions qu'elle donne à l'Hôtel Dieu de Château-Thierry en prescrivant de servir aux infirmes un meilleur repas les jours des fêtes de la Sainte Vierge, en signe de réjouissance. Elle fonde une rente de cent livres à N.-D. de l'Isle près de Troyes, à la condition d'un service anniversaire le jour de sa mort.
La dévotion du Monarque est récompensée par une protection spéciale de Marie: à la bataille de Mons en Puelle, contre les Flamands, en 1304, le Roi est sauvé de la mort par une invocation à la Reine du ciel qui lui accorde la victoire. "Pour rendre grâces condignes à la Vierge, célébrer les honneurs justement par Elle mérités" il fait des dons royaux à N.-D. de Boulogne, offre à N.-D. de Chartres l'armure qu'il portait à la bataille et "établit à N.-D. de Paris une fête qui se faisait tous les ans le 18 août, sous le titre de Commémoration de N.-D. de la Victoire" (5). Enfin, une statue de la Vierge ayant été découverte en terre en 1280 dans le domaine de Cléry, appartenant à son aïeule, Marguerite de Provence, et de très nombreux miracles y ayant été obtenu, il décide - pour témoigner sa reconnaissance à Marie de la reprise des Flandres et de la Gascogne - d'y ériger une magnifique église dédiée à la Vierge; la mort seule l'empêche de réaliser son projet (6).
Malheureusement, au sujet des impôts à percevoir sur le Clergé, le Roi entra en conflit avec le Pape Boniface VIII; les caractères du Souverain Pontife et du Roi étant aussi violents qu'autoritaire, rapidement le conflit dégénéra en une lutte ouverte, publique et implacable. Le Pape, au lieu de s'en tenir à la question qui le mettait aux prises avec le Roi, émit des prétentions inadmissibles sur les droits inaliénables et imprescriptibles de la Couronne de France et mit ainsi le feu aux poudres. De son côté, l'envoyé du Roi dépassa les instructions de son Maître à Anagni. Le retentissement de cette lutte fut immense et eut des conséquences incalculables; l'indépendance temporelle des Etats et des Princes fut assurée, mais "la puissance morale de la Papauté, seule capable de servir de frein à l'ambition et à la violence" était brisée. "C'était la fin du beau Moyen Age chrétien" (7). Quels qu'aient été les torts réels de Boniface VIII, ce n'était pas au Fils Aîné de l'Eglise, au propre petit-fils de Saint Louis de rendre impossible pour l'avenir cette oeuvre magifique réalisée par l'Eglise et d'arracher ainsi au Pontife Romain l'influence admirable qu'en dépit de quelques abus il avait exercée depuis plusieurs siècles sur les Princes et sur les Etats chrétiens.
Pour consacrer cette oeuvre malfaisante, il convoqua à cet effet les Etats Généraux et pour la première fois fit appel au Tiers Etat qui cinq siècles plus tard devait renveser la Moarchie. Les trois ordres ratifièrent sa conduite.
Le crime ayant été royal et national davait encourir un châtiment royal et national:
Le Roi bourrelé de remords, vint souvent depuis lors à N.-D. de Longpont "implorer sans doute de la Madone le "pardon de sa cruauté vis-à-vis du Pape Boniface" (8) et mourut en faisant à son Fils, les magnifiques recommandations suivantes: "Premièrement, aimez Dieu, craignez-Le, respectez l'Eglise, soyez-en le protecteur, le défenseur, soutenez votre foi; soyez un champion invincible du ciel...". C'était le désaveu implicite de sa faute. Ses trois fils vont lui succéder sur le Trône sans laisser d'héritier. La couronne passe à la branche des Valois. Voilà le châtiment royal.

(1) Hamon: op. cit. II. 233.
(2) Lefèvre: Histoire de N.-D. de Pontoise - I, 9.
(3) Hamon - id., II, 233.
(4) Id., V. 575.
(5) Annales de l'Archiconfrérie de N.-D. des Victoires, Xbre 1936, p. 367.
(6) Hamon - id., I. 337.
(7) Histoire de France. (Collection de Classiques Saint-Gabriel), Editions de l'Ouest, 40, rue du Cornet à Angers, dont nous ne saurions trop recommander les publications.
(8) Nicolas - N.-D. de Longpont - p. 31.

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